Il est très étonnant d’entendre autant de personnes demander l’interdiction de signes et vêtements religieux à l’école au nom de la laïcité. C’est en effet un contresens total, un dévoiement de la notion de laïcité.

La laïcité est l’un de principes fondateurs de notre république, énoncé dans l’article 1 de la Constitution. Ses dispositions sont précisées dans la loi du 9 décembre 1905. Selon le Conseil constitutionnel, le principe de laïcité garantit notamment « le respect de toutes les croyances et l’égalité de tous les citoyens devant la loi sans distinction de religion ». Garante de la liberté de conscience et de la liberté religieuse, la loi de 1905 instaure pour cela l’absolue neutralité de l’État à l’égard de toutes les religions et de leurs pratiques.
C’est au nom de ce principe que la loi interdit à l’État et à ses représentants, dans l’exercice de leur fonction, les signes et emblèmes religieux. C’est pour cela que, pour respecter la liberté de conscience de tous les citoyens, les bâtiments publics ne peuvent abriter ni crèches chrétiennes, ni tout autre symbole religieux. En revanche, la laïcité n’impose strictement rien aux simples citoyens, y compris à l’intérieur des bâtiments publics. A l’école publique, la laïcité se traduit par le fait d’interdire aux personnels de porter des signes religieux et de faire du prosélytisme ou même de favoriser une religion. Les élèves, eux, sont des usagers de ce service public, leur liberté de conscience et de religion sont garanties et le principe de laïcité n’impose aucune restriction à leur liberté d’agir, de s’exprimer, de se vêtir, autre que les règles de droit commun.
La loi de 1905 est donc une loi qui garantit des libertés, pas une loi qui restreint les libertés. Vouloir interdire certains vêtements et signes religieux aux élèves des écoles publiques, cela n’a strictement rien à voir avec la laïcité, c’est un contresens total. Pire encore, ces interdictions constituent une discrimination religieuse, donc une violation de la laïcité, puisqu’elles sont conçues pour restreindre la liberté des seuls musulmans, même si elles sont formulées de manière plus large (pour ne pas enfreindre la constitution). Il est très étonnant d’entendre autant de personnalités politiques énoncer quotidiennement ce contresens sans jamais être contredites, notamment par les journalistes qui relaient sans filtre leurs discours. Malheureusement, ils sont confortés en cela par la loi du 15 mars 2004 sur le port des signes religieux dans les écoles publiques qui a légalement instauré ce dévoiement de la laïcité, en contradiction avec la loi de 1905.
Même si l’on esquive le contresens sur la laïcité, on peut malgré tout vouloir interdire le voile et l’abaya au nom de la lutte contre l’intégrisme religieux, particulièrement lorsqu’il s’exerce sur des enfants. Mais le fossé béant entre le but et le moyen est risible. Se focaliser sur les vêtements et les signes religieux, c’est s’attaquer à un symptôme dérisoire, le seul symptôme publiquement visible, plutôt qu’aux causes. Restreindre la liberté vestimentaire de personnes religieuses ne fait strictement rien pour modifier leurs croyances, ni pour diminuer l’influence des idées intégristes. De fait, on ne peut que constater que la loi de 2004 n’a en rien enrayé la montée de l’intégrisme musulman en France.
L’endoctrinement religieux des enfants est un vrai sujet, qui concerne toutes les religions, mais qui n’est pas soluble aisément par des interdictions péremptoires. Si l’on veut rester un état de droit et une république laïque, on doit continuer à garantir la liberté religieuse, ce qui implique d’accepter ses multiples expressions, visibles et non visibles, quoi qu’on pense des croyances sous-jacentes. Et l’on peut difficilement remettre en cause le droit des parents de choisir l’éducation de leurs enfants, y compris religieuse. Si l’on veut limiter les effets de l’endoctrinement religieux des enfants, le mieux que l’on puisse faire est de les exposer le plus possible à la diversité des idées et de les intégrer le mieux possible à une société française diverse et ouverte sur le plan culturel, religieux et philosophique. Les interdictions vestimentaires et toute autre mesure discriminatoire risquent au contraire d’alimenter le rejet de la société française, le repli communautaire et la radicalisation.
Une autre motivation souvent avancée à l’appui des restrictions vestimentaires à l’encontre des femmes musulmanes est le féminisme. Il ne fait aucun doute que le voile islamique et l’abaya sont des symptômes de la volonté d’asservir la femme musulmane. Néanmoins, penser que l’on puisse prévenir cet asservissement en interdisant ces vêtements est d’une naïveté confondante.
Ces interdictions manifestent un paternalisme ahurissant, supposant que les femmes musulmanes sont de simples marionnettes manipulées par les hommes, qu’elles n’ont aucune conviction religieuse propre et aucun libre arbitre, alors même que la plupart des femmes qui portent le voile déclarent le faire par choix. Bien sûr, leurs choix vestimentaires sont influencés à la fois par les textes religieux, par l’interprétation qu’en font les prédicateurs et par la pression sociale. Mais tous nos choix vestimentaires (et autres) sont exercés sous influence, sous la pression de diverses injonctions, culturelles et commerciales. D’un point de vue féministe, l’injonction à dissimuler son corps du regard des hommes n’est ni plus ni moins problématique que l’injonction à s’habiller sexy pour attirer leur regard. Ajouter à toutes ces influences des interdictions pour certaines femmes de porter certains vêtements, contre leur propre avis, au nom de la libération de la femme, n’est-ce pas paradoxal ? Dans la mesure où il n’est pas possible de vivre en société sans être influencé, le mieux que l’on puisse faire pour les femmes comme pour les hommes est de préserver leur autonomie, leur libre-arbitre, et de les laisser entièrement libres des influences auxquelles ils choisissent de se soumettre.
D’ailleurs, les femmes musulmanes qui luttent contre le voile, parfois au péril de leur vie (en Iran, en Afghanistan) ne réclament pas l’interdiction du voile. Ce qu’elles demandent, c’est la totale liberté vestimentaire, pas des contraintes vestimentaires différentes imposées aux femmes. Les personnes qui réclament l’interdiction du voile sont celles qui ne le portent pas, et elles réclament l’interdiction pour celles qui le portent. L’avis des premières concernées, lui, n’est curieusement jamais jugé pertinent.
Dans un état de droit, on doit s’efforcer de préserver un maximum de libertés, et les restrictions imposées aux libertés doivent être motivées par des nécessités impérieuses. Comme nous l’avons vu, ni la laïcité, ni la lutte contre l’intégrisme religieux, ni le féminisme ne sont de bonnes justifications pour restreindre la liberté vestimentaire. Les véritables motivations de ceux qui demandent une telle restriction ont sans doute plutôt à voir avec l’inconfort engendré par des apparences peu familières, le fait de parfois se sentir en pays étranger, de « ne plus reconnaître la France ». On peut entendre ce sentiment, tout en défendant l’idée qu’il faut se garder de toujours vouloir interdire tout ce qui dérange, et que l’inconfort d’une partie des citoyens n’est pas une raison suffisante pour restreindre la liberté des autres. De plus, la multiplication des interdictions ne fait qu’engendrer des conflits inutiles, obligeant les professeurs à faire la police vestimentaire au lieu d’enseigner, et sapant au passage le lien de confiance avec leurs élèves.
Aucune interdiction vestimentaire ne fera reculer l’intégrisme religieux et l’endoctrinement des enfants, bien au contraire. Ce ne sont que des mesures politiques futiles destinées à rassurer l’opinion en masquant les problèmes. Si la France veut rester une république laïque et libérale, elle ferait bien de commencer par abroger la loi du 15 mars 2004, plutôt que d’aggraver la tendance en empilant les interdictions et les discriminations religieuses.
Ajout du 13/12/2023
A tous ceux qui disent « Vous n’avez rien compris à la laïcité, la laïcité c’est [insérez votre définition maison] », je renvoie au site gouvernemental officiel qui définit la laïcité et en donne toutes les sources. En résumé:

Cher Franck Ramus,
Avez-vous connaissance des résultats des recherches d’Éric Maurin (synthétisées dans Trois leçons sur l’école républicaine) sur l’impact de la loi de 2004 sur la scolarité des jeunes filles issues de l’immigration ? Et si oui qu’en dites-vous ?
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Je suis abasourdie par votre article. Je suis une femme et tout ce qui relève de l’injonction de devoir porter un vêtement infamant pour mon sexe, ce qui n’est jamais demandé aux hommes, est scandaleux. Je suis issue d’une génération qui a vu ses aînées se battre pour le droit à l’avortement, je suis la première génération qui a pu s’assumer complètement tant sur le plan personnel que professionnel, et je vois des jeunes filles qui revendiquent cette supposée infériorité de la femme vis-à-vis de l’homme, être une bonne musulmane avant d’être une femme. Vos arguments sont consternants, heureusement au contraire que l’on a eu la loi de 2004 pour lutter contre ce fléau. Je pensais Franck Ramus, lui le rastafari, un peu moins consternant que cela. C’est triste.
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Je vous conseille la lecture de « Dévoilements : du hijab à la burqa, les dessous d’une obsession française » de Pierre Tevanian (Libertalia, 2012) et de relire ce passage du texte impeccable de Frank Ramus :
« Dans la mesure où il n’est pas possible de vivre en société sans être influencé, le mieux que l’on puisse faire pour les femmes comme pour les hommes est de préserver leur autonomie, leur libre-arbitre, et de les laisser entièrement libres des influences auxquelles ils choisissent de se soumettre. »
Être libre de se soumettre à des influences : qu’est-ce qui n’est pas clair pour vous ?
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Vous êtes très offensée par les injonctions vestimentaires faites par l’islamisme aux femmes, et je vous comprends. Je ne les apprécie pas plus que vous. Mais votre colère ne semble pas vous avoir permis de vraiment lire mes arguments.
Toute la question que je soulève est de savoir, si, dans un état de droit, on peut interdire tout ce qui vous offense et vous met en colère. Est-ce que des interdictions vestimentaires (s’imposant aux femmes) sont le bon moyen de lutter contre le sexisme? Quand je dis bon, je veux dire non seulement un moyen efficace , mais aussi un moyen légitime dans un état de droit.
Efficace: est-ce qu’interdire le port de certains vêtements religieux est susceptible d’avoir le moindre effet sur le sexisme inhérent à l’islam (et à d’autres religions), sur l’asservissement de la femme musulmane, et sur les croyances religieuses sous-jacentes? Permettez-moi d’en douter. Si vous connaissez des preuves d’une telle efficacité, merci de les communiquer. Au contraire, il me semble que de nombreuses données sociologiques et psychologiques suggèrent que les discriminations subies favorisent plutôt la radicalisation.
Proportionné: c’est-à-dire un moyen qui n’engendre pas des restrictions de liberté excessive, par rapport à la liberté qu’il est censé défendre. Est-il vraiment légitime (et même logique) de restreindre la liberté des filles musulmanes pour les « libérer »? Je mets « libérer » entre guillemets car la plupart d’entre elles ne demandent nullement à être libérées, et dire qu’on les libère est surtout une manière de justifier des mesures qui ont des buts différents (comme apaiser votre colère vis-à-vis du sexisme islamiste).
Voilà, si vous arrivez à aller au-delà de votre colère, n’hésite pas à répondre sur les arguments eux-mêmes.
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C’est vous qui n’avez rien, mais alors rien, compris à l’esprit de la laïcité. Avez-vous seulement lu les débats de 1905. Il apparaît que les députés souhaitent absolument éviter l’aliénation à la religion (la religion catholique, dominante, est la première ciblée). Un des objectifs philosophiques majeurs, présent dans presque tous les articles de lois généraux, est la préservation prioritaire de la liberté de ne pas croire. Le droit du non-croyant à ne pas être aliéné est tout à fait premier. Avec par exemple « la liberté ne reconnaît aucun culte »-art 5. On supprime les nouveaux signes religieux dans l’espace public, véritable prophylaxie quand on y réfléchit. Les processions sont supprimées dans le texte initial puis tolérées car Briand les juge déjà désuètes donc non dangereuses. Le vêtement religieux est discuté mais lui aussi dejà désuet et envisagé sous l’angle du prestige vestimentaire uniquement non pas de l’uniforme de masse, pouvant peser sur le non croyant comme un signe religieux présent en public – nul doute que le voile, porté par des millions de personnes, aurait été absolument interdit au même titre que les symboles religieux pesant dans l’espace public et pour les mêmes raisons: cette liberté vestimentaire est aujourd’hui aliénante pour les autres.
Les signes religieux ET les vêtements religieux ostentatoires sont interdits à l’école (pas par 1905 effectivement mais) au même motif: l’enfant est plus aliénable que l’adulte et l’école doit être pour lui un milieu libéré de toute pression religieuse aliénante. La loi de 2004 est un ajout totalement dans l’esprit de 1905, non pas une contradiction. La décision du conseil d’état sur les mères accompagnantes voilées un pur scandale, contre l’esprit de 1905 qui vise à la protection des enfants, et devra être modifiée par la loi. Le problème n’est pas en effet le « droit » des mères mais la protection de l’enfance. Le CE a agi en l’espèce en organisation islamo-gauchiste au lieu de rechercher l’esprit de la loi. Et vous aussi vos commentaires sur le sujet sont dramatiques, ignorants et venant d’un chercheur quand même honorable, ils sont une honte.
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« cette liberté vestimentaire est aujourd’hui aliénante pour les autres » : j’avoue ne pas comprendre qu’on puisse raisonner ainsi (les sujets d’aliénation ne manquent pas !).
L’auteur du texte souligne avec beaucoup de justesse que la loi de 2004 n’a en rien fait reculer l’islamisme (quoiqu’on mette derrière ce terme). Alors ?
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Vous assimilez des vêtements à une pression religieuse aliénante. C’est un point de vue possible, mais qui me parait très excessif. Les vêtements manifestent une appartenance à un groupe (religieux, culturel, social), et c’est la principale raison de leur choix (c’est vrai pour tout le monde). Les vêtements ne font pas de prosélytisme par eux-mêmes. Que les musulmans soient reconnaissables par leurs vêtements ou pas, ils existent, ils sont présents à l’école, et sont connus comme tels par leurs camarades. Je ne vois pas en quoi porter des vêtements caractéristiques de leur communauté rend cette communauté plus aliénante pour les autres. Elle est juste plus visible de loin. Est-ce que c’est un mal si grand qu’il faille imposer des interdictions vestimentaires, qui sont liberticides et ne règlent rien des problèmes de fond concernant l’endoctrinement religieux des enfants?
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En réalité, peu importe que mon point de vue « la pression religieuse aliénante » vous paraisse excessif. L’esprit de la laïcité est de préserver les AUTRES (les non-croyants, les non musulmans) contre toute possibilité de pression aliénante. La laïcité est une prophylaxie et toute prophylaxie est par nature excessive – on se lave toujours les mains plus souvent qu’à son tour pour éviter la contagion. Le problème dépasse donc de loin la « liberté » des femmes voilées. On parle de la liberté des autres.
Il est important que vous compreniez le côté prophylactique de la laïcité. Si on interdit l’édification d’une statue religieuse dans l’espace public, cela a aussi un côté excessif mais le fait est que cette prophylaxie a fonctionné et qu’elle est sans doute la pire des méthodes, à l’exception de toutes les autres.
Maintenant sur le fond, je suis étonné que vous ne compreniez pas cette « pression religieuse ». Je vous conseille de (re)lire « Rhinocéros » ou « La Peste ». La façon dont le mimétisme s’y propage est en tous points identique à la façon dont le voile se propage. Beaucoup de femmes se voilent brusquement, sans savoir pourquoi, exactement comme dans Rhinocéros. Peut-on parler de choix ? Je ne le crois pas – mais encore une fois, je n’ai rien contre ces femmes. Je pense simplement que leur « liberté » doit s’incliner devant celle des autres.
La pression sociale qui conduit les femmes à s’habiller sexy n’est pas visée par la laïcité, donc votre remarque sur ce point est hors sujet. Par ailleurs, j’observe que la tendance des femmes à vouloir s’habiller sexy est présente dans presque toutes les cultures connues, donc on peut lui donner un côté universel et peut-être inné, donc non social. Enfin, si on juge que pression il y a, on pourrait envisager d’étendre la prophylaxie laïque à, par exemple, des mesures visant à restreindre l’efficacité de la publicité. La publicité engendre les mêmes comportements mimétiques que le port du voile. Comme elle n’a pas d’intention autre qu’économique, on lui prête souvent peu d’importance mais il est clair qu’elle modifie profondément le monde – bien plus qu’en 1905 et peut être faudrait-il l’intégrer. L’école l’a déjà fait: il ne doit y avoir aucune publicité dans le cadre scolaire, pas plus que de symbole religieux.
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J’ai répondu partiellement à côté. Le vêtement n’est pas aliénant par nature pour les autres, sauf lorsqu’il fait uniforme. Or le voile tient évidemment de l’uniforme, comme le burkini, etc. Tout le monde est d’accord pour interdire les chemises brunes; en tant que signe religieux visible pesant sur les masses, le voile a la même fonction. Le voile dans l’espace public est un instrument renforçant l’islam politique contre lequel la laïcité doit lutter.
Par ailleurs, deux autres points, mais la laïcité n’a rien à nous dire là dessus, effectivement:
– le voile est une sorte d’étoile jaune volontaire qui exclut les musulmans en les signalant.
– le voile est un instrument d’asservissement des femmes puisqu’il les rend coupable du désir sexuel masculin
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Bonsoir
Vous raisonnez comme s’il n’était question que de respect envers une croyance intime, ou de liberté individuelle.
Or la lutte, car lutte il y a, se joue à un tout autre niveau. En effet les religions sont des idéologies politiques qui promeuvent la supériorité du texte sacré sur la science comme sur la loi des hommes.
La République n’est pas neutre, elle défend justement le contraire.
Il est clair que par leur accoutrement, des esprits jeunes sont instrumentalisés pour aller à la percussion frontale de l’école Républicaine.
Je suis personnellement d’accord avec Jean, l’esprit de la loi de 1905 est à chercher dans là : et il convient de choisir son camp.
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Les lieux d’enseignements publics surtout s’ils rassemblent des mineurs doivent être neutres, ce n’est évidemment pas le cas de l’enseignement privé ou confessionnel. Il est très important de bien différencier les deux.
Le public a des obligations que le privé n’a pas. Le quart de la population scolaire se trouve dans le privé et dans certaines écoles catholiques, on trouve des salles de prière pour les musulmans ou pour d’autres religions. En matière d’éducation, les parents ont donc le choix, un choix limité par la loi (le nombre d’écoles privées sous contrat est restreint à cette proportion) et parfois par le coût.
Les lois sur la laïcité n’ont jamais interdit l’expression religieuse de quelle que nature qu’elle soit.
En revanche, dans les écoles publiques, c’est interdit et pas seulement aux fonctionnaires qui, malgré tout, ont la liberté de pratiquer leur religion à l’extérieur.
Le Public ne porte absolument pas atteinte aux convictions religieuses, athées, ou agnostiques. Il en interdit l’expression car les lieux de transmissions de connaissances doivent être neutres pour ne pas les entacher de conflits ayant leur source sur des questions improuvables : Dieu existe ? N’existe-t-il pas ? qui a raison, les croyants ou les incroyants ?
L’école publique n’est pas le lieu de ces débats irrésolus qui ne peuvent que mener à la discorde et au raidissement des convictions.
Comme vous le dites si bien par ailleurs, l’Education doit se fonder sur des preuves, pas sur des a priori indémontrables qui ne sont pas condamnables en eux-mêmes et méritent tout autant de respect que les a priori contraires.
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« Les lois sur la laïcité n’ont jamais interdit l’expression religieuse de quelle que nature qu’elle soit.
En revanche, dans les écoles publiques, c’est interdit et pas seulement aux fonctionnaires(…) »
Bonjour,
Ce passage est erroné. Les fonctionnaires sont interdit de toute expression religieuse, mais pas les élèves. La laïcité leur interdit les signes ostentatoires dans l’école. Ce qui est tout à fait sujet à interprétation et pas nécessairement juste envers les diverses religions. Mais sur le principe, une signe religieux non-ostentatoire est légal.
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> Les lois sur la laïcité n’ont jamais interdit l’expression religieuse de quelle que nature qu’elle soit. En revanche, dans les écoles publiques, c’est interdit et pas seulement aux fonctionnaires qui, malgré tout, ont la liberté de pratiquer leur religion à l’extérieur.
Pas du tout. La loi de 1905 ne s’applique qu’aux représentants de l’Etat dans l’exercice de leur fonction, en aucun cas aux usagers des services publics que sont les élèves et leurs parents.
Seule la loi de 2004 a introduit une interdiction s’appliquant aux élèves. Mais cette loi a été votée uniquement pour s’opposer au voile porté par certaines filles musulmanes. Autrement dit, elle est en contradiction flagrante avec la neutralité à l’égard de toutes les religions qui est l’essence même de la laïcité. La loi de 2004 ne définit pas la laïcité, elle est une entorse à la laïcité. C’est précisément l’incompréhension que je dénonce.
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Vous mélangez votre réponse à mon propre texte, ce qui crée un effet mosaïque. D’autre part, vous vous attachez à réfuter un point que je ne conteste pas (souvent la loi comporte trop d’implicites qui amènent des débats sans fin et que seuls les décrets d’application éclairent).
Pour rappel, dans certains lycées, on a détruit les chapelles provisoires, en général en bois, qui s’y trouvés. Evidemment pas, celle d’Henri IV, classée ! Le Conseil d’Etat et le Conseil constitutionnel n’ont pas manifesté leur opposition.
Enfin, c’est à la fin de mon texte que j’explique les raisons qui ont poussé l’Etat à interdire tout signe ostensible dans les établissements publics mais naturellement pas dans le privé, ce qui serait, pour le coup, inique. C’est ce qui a mis fin à la guerre scolaire. Vous semblez oublier la loi de 1901 qui a permis à la fois la formation des syndicats et des associations cultuelles. S’il n’y avait pas 1901 vous auriez raison.
Les préférences politiques se règlent au moment des élections et par le vote majoritaire. Les préférences religieuses ou non religieuses sont indécidables et donc ne peuvent pas faire l’objet d’un enseignement qui serait nécessairement partisan.
L’école publique est un donc « sanctuaire » non religieux. L’expression est amusante mais protectrice. En revanche, les programmes prévoient l’étude historique du fait religieux, ce qui est tout à fait autre chose. Du point de vue politique, il existe des syndicats de lycéen, ce qui règle la question et paraît judicieux.
Il y a un million de cas de harcèlements en France pour des raisons diverses, si en plus vous ajoutez des motifs qui relèvent de convictions absolues et irréfutables dans un sens ou dans un autre, je ne sais pas comment les professeurs, les élèves et l’administration vont gérer cette nouveauté.
Les collèges et les lycées sont à la limite de l’explosion (pour des raisons de personnels, de dotation etc.) si vous ajoutez des ferments métaphysiques de division, on sera dans le chaos.
Le système a besoin de paix et de neutralité authentique.
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« si vous ajoutez des ferments métaphysiques de division, on sera dans le chaos. Le système a besoin de paix et de neutralité authentique. »
Rappeler le fondement de la loi (les établissements publics sont des sanctuaires contre le prosélytisme), et que la laïcité a pour base de traiter toutes les religions a égalité, a savoir imposer les même règles, sans mesures spécifiques donc, est clairement aller dans le sens de la paix et de la neutralité authentique. Pourquoi donc cette accusation assez grave de pousser au chaos ? Cela n’est en lien à aucun de vos argument et contraires au faits.
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En plus détaillé
https://thierry.fr/2018/09/30/lesprit-perdu-de-larticle-28-de-la-loi-de-1905/
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Ces questions sont délicates et il est toujours nécessaire de les aborder en essayant de respecter au mieux les libertés qui fondent la démocratie. Je pense toutefois qu’il peut y avoir une vraie différence entre les points de vue des hommes et ceux des femmes à ce propos. Les vêtements islamiques destinés aux femmes visent, comme indiqué, à « asservir les femmes ». Que de nombreuses personnes affichent publiquement leur croyance en l’infériorité des femmes par rapport aux hommes constitue tout de même un problème de mon point de vue – bien sûr que dans une société encore largement non égalitaire, bien des gens peuvent penser que les femmes sont inférieures aux hommes – mais on ne le voit pas dans la rue ! Les femmes voilées dans la rue, c’est en quelque sorte l’équivalent de personnes qui marcheraient tenues en laisse… tout est possible dans un cadré privé, pourquoi pas, mais clairement, dans l’espace public, affirmer des valeurs contraires aux valeurs républicaines, cela ne va pas de soi. Vous précisez aussi que cet asservissement concernerait les femmes « musulmanes ». Mais je crains que justement, ce ne soit pas réservé aux femmes musulmanes – ce qui est en soi déjà terrible, mais effectivement, certaines peuvent choisir d’afficher dans l’espace public leur soumission à une croyance ou à la domination masculine, et les en empêcher par la loi peut être considéré comme illégitime et excessif, si l’on fait abstraction de mon premier argument. Mais le second problème majeur est que ces vêtements tracent aussi la frontière, pour certain-e-s du moins, entre les femmes « respectables », voilées, « pudiques », et celles qui ne le sont pas, musulmanes ou non. L’anecdote avec les femmes archéologues en short sur un chantier de fouilles, agressées verbalement en raison de leur tenue, est révélatrice à cet égard. Une anecdote personnelle m’a aussi fait réaliser cela, en sortant d’une MJC dans une cité, à l’issue d’une conférence, un été, en robe légère (je me sens obligée de préciser que ce n’était ni une minirobe ni une robe avec un décolleté plongeant… juste une robe d’été sans manches, aux genoux) ; je me suis retrouvée dans la rue entourée d’une majorité d’hommes et de quelques femmes toutes vêtues de robes longues couvrantes et voilées. Même s’il ne s’agit que d’un sentiment subjectif, les regards sur moi et le malaise que j’ai ressenti m’ont fait envisager les choses différemment, alors que j’étais plutôt libérale jusqu’alors sur le sujet. Merci de partager vos réflexions toujours argumentées et posées !
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Bonjour,
La définition de la laïcité n’est pas donnée par un gouvernement sur un site officiel (?); elle résulte de l’interprétation que donne le Conseil Constitutionnel de la Constitution (entre autres textes) et, sur le point qui vous soucie, depuis 2004 celle-ci est connue. L’idée que vous vous faites de la laïcité est peut-être intéressante, sa portée est celle de votre blog. Bien à vous.
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Oui à la liberté de se vêtir de façon religieusement orientée dans l’espace public à condition de respecter un âge minimal afin de préserver la liberté de conscience des plus vulnérables !
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Bonjour et merci pour cette tribune.
Il y a un point sur lequel je ne vous rejoins pas. La loi interdit aux élèves les signes religieux ostentatoire. J’y vois une vrai importance, dans le sens ou il me semble que l’école ne devrait pas permettre des activités de prosélytisme religieux systémique, même non liés à l’établissement public. Il me semble aussi qu’il faudrait prendre ces signes interdits comme étant religieux au sens stricte : certes on devine tout de suite la religion d’une personne ayant des mocassin un pantalon classique, une chemise à carreau et des mocassins à gland, mais je ne pense pas qu’il faille cibler des vêtements globalement plus sociétaux que religieux. Je suis contre un ciblage d’une communauté plutôt qu’une autre, ce qui vaut pour le voile – et croyez bien que je suis contre les obligations morales normatives qui pèsent sur les chrétiens comme sur les musulmans ou tout autre religion.
Je pense que les religions sont des poisons de l’esprit, que chaque humain a le droit de s’empoisonner, et qu’il est malhonnête de choisir quelle étiquette de poison on interdit. Ce qui n’empêche pas de judiciariser l’usage de poison sur les autres selon les comportements, ni n’empêche de favoriser par l’éducation les prises de consciences et les comportements respectueux. Cela ne constitue malheureusement pas des points de communication politique efficaces.
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Comme l’un des commentaires l’a déjà indiqué, ce n’est pas le gouvernement qui fixe le sens d’un principe juridique comme la laïcité. On peut ajouter qu’il n’est pas très cohérent de faire de lui l’autorité à consulter pour savoir ce qu’est la laïcité, quand vous l’accusez par ailleurs de dévoyer cette dernière (l’interdiction de l’abaya, en tout cas, provient bien de l’exécutif actuel). Mais dans le texte auquel vous vous référez, il y a par ailleurs une notion que vous semblez négliger : celle d’ordre public. Les critères qui définissent cet ordre peuvent varier selon les lieux, leur fonction et le public qu’ils sont destinés à accueillir (les écoles primaires et secondaires étant destinées à accueillir principalement des mineurs pour que la puissance publique prenne en charge une partie de leur éducation). Jean Zay, dans ses circulaires de 1936 et 1937, affirmait déjà que l’ordre, dans les établissement scolaires, implique que les élèves ne puissent pas y être utilisés par des mouvements politiques et religieux pour faire de la propagande. Certes, il parlait de comportements tels que la distribution de tracts ou l’affichage, dans les fournitures scolaires, de programmes politiques, et non du port ostensible de signes d’appartenance. Les partisans de l’abrogation de la loi de 2004 en tirent prétexte pour dire que ces circulaires n’ont aucun rapport avec cette interdiction-là. Mais on peut aussi considérer que prescrire ce port ostensible est bien, pour une religion, une manière de faire sa publicité, et qu’il y a donc bien un désordre si les établissements scolaires publics sont utilisés par les religions dans ce but.
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Effectivement, ce que vous énoncez et défendez se réfère à l’intention originelle de la laïcité. Chaque femme, dans un contexte personnel (et notamment dans les lieux publics) devrait être libre de se vêtir comme bon lui semble, dans le respect des lois françaises (par exemple, ne pas masquer le visage).
Néanmoins, je pense que nos gouvernements doivent également prendre en compte les tentatives d’ingérence de pays islamiques, qui agissent intensément depuis des décennies par l’intermédiaire des chaînes paraboliques et d’internet. Il est par exemple flagrant que des femmes et adolescentes portent des vêtements fortement conseillés par des imams qui n’ont cure de nos principes de laïcité, sauf pour les abattre. Ces vêtements ne ressemblent en rien aux habits traditionnels des marocaines, algériennes, tunisiennes jusqu’au milieu du 20ème siècle. Ces gouvernements et prédicateurs islamiques mettent tout en oeuvre pour disposer au sein de nos démocraties de musulmanes et musulmans acquis aux lois du Coran. Ces mêmes gouvernements et prédicateurs préconisent de réaliser cette conquête de façon larvée (acceptable et progressive), en expliquant que le Coran enseigne cette manière pour vaincre les mécréants.
Il semble alors plus que légitime d’envoyer des messages clairs à ces pays et groupes d’influence pour contrer leur action anti démocratique.
Vous connaissez Machid Oukacha ?
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Une courte remarque pour Machid Oukacha : il affirme (interview à l’Agefi) « La majorité des musulmans se sent plus proche d’un musulman islamiste qui veut appliquer à la lettre les lois du Coran que d’un non-musulman qui ignore le Coran. »
Il est médiatiquement principalement porté par l’extrême droite. Il convient à aborder son travail avec une connaissance de son orientation anti-musulmans, même si cela n’invalide pas l’ensemble de ses propos sur la religion musulmane.
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Je suis parfaitement conscient des tentatives d’influence de la part des pays islamiques, et je ne les apprécie pas plus que vous. Toute la question est à nouveau de savoir si les moyens proposés sont à la fois légitimes et efficaces par rapport aux buts à atteindre.
Est-il vraiment légitime et proportionné d’imposer des restrictions de liberté aux femmes pour atteindre un but tel que « envoyer des messages clairs à ces pays et groupes d’influence »?
Et pensez-vous vraiment que ce soit un moyen efficace? Ou est-ce qu’au contraire cela conforte les islamistes dans l’idée que la France discrimine les musulmans, et qu’une guerre sainte est d’autant plus justifiée?
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Merci pour ce billet de bon sens.
Cela dit, cette disposition mentale vis-à-vis de la laïcité remonte à bien avant la vague migratoire: nous n’avons réussi à calmer notre société qu’en rendant le débat sur les questions métaphysiques et/ou religieues taboues. Bien avant la thématique islamique, il était très très mal vu d’aborder, en France, de quelconques questions touchant de près ou de loin aux religions. Les catholiques n’ont toléré les athées qu’à condition qu’ils renoncent à toutes prétentions de philosophie morale, et les athées n’ont toléré les catholiques qu’à condition qu’ils ne fréquentent pas l’école publique et la ferment. En grossissant le trait. L’interprétation populaire de la laïcité, c’est celle de l’instauration d’un couvercle sur la marmite religieuse. Ce qui est contraire non seulement comme vous le dites, à la laïcité, mais aussi aux principes mêmes de la liberté d’expression, qui a pour but que nous délibérions, en tant que société, sur les thèmes, par exemple, de philosophie morale, entre athées et catholiques, afin d’utiliser notre parole et le débat public afin de planifier et de délibérer notre avenir. Force est de constater que, bien avant la question de l’islam, nous avions déjà fait le choix de vivre côte à côte et non pas ensemble. Cela n’est pas récent, en soi.
Et maintenant que l’islam est de sortie, nous assistons, éberlués, au bal des faux culs, qu’il s’agissent de nos fondus catholiques, qui n’ont pas disparus, de nos islamistes, franchissant le mur du çon sans freins, et de nos pseudo-athées pseudo-laïques qui n’ont tendance qu’à l’être à la mode chinoise ou coco, c’est à dire hostiles au débat d’idées, et dont la tolérance est à géométrie très variable.
Moi, le voile me fait *****. J’ai le droit de le dire, et d’en débattre. Mais, comme vous le dites si bien, mon inconfort n’a aucune légitimité à devenir loi.
Je crois que c’est J. S. Mill qui disait que la tolérance religieuse, c’est de faire en sorte qu’aucune bigoterie ne soit plus sacrée que celle des autres. Les islamistes ne l’acceptent pas. Nos catholiques ne l’acceptent qu’à reculons, et contraints. Nos pseudo-laïques et/ou athées du village n’ont toujours pas compris l’enjeu. Ou le comprennent, mais, n’arrivant pas à le communiquer face à des idiots dans l’espace public, se satisfont de mesures semi-autoritaires. Avec plus ou moins d’arrières pensées.
C’est en effet difficile d’expliquer à toute une frange de la population en quoi les religions et le dogmatisme représente un danger. (Surtout quand ces questions sont mélangées sans discernement à des questions culturello-identitaires, et soutenus par des discours de plus en plus débiles et aliénants sur le racisme; discours qui en viennent à peu choses près à prétendre qu’il faut tuer des juifs par antinazisme… Ce qui n’est qu’à peine une exagération, ainsi que la pointe émergée de l’iceberg.)
Il y a toutefois, il faut le reconnaître, trop de complaisance face à la pression sociale des religions, islam bien évidemment compris. Ce dévoiement de la laïcité, que vous pointez du doigt à juste titre, est un pis-aller car c’est la seule réponse que nous sommes à l’heure capables de conceptualiser. Je m’en réjouirais si ce n’était qu’une première étape ouvrant la voie à des approches plus éclairées. Mais je doute, euphémistiquement, que cela en soit le cas: déjà que, sans l’islam, les français ont un gros problème de fétichisation de l’esprit de système, à deux doigts du dogmatisme, rajoutez les discours déconnants de nos théocrates musulmans, et on repart pour un tour.
Je partage votre constat. Je ne vois par contre pas (beaucoup) d’autres voies d’action. À mon grand regret.
De la part d’un athée radical hostile aux religions et dogmes.
Dieu n’existe pas et Hitchens est son prophète.
P.S.: Cela étant, je ne suis pas entièrement négatif sur la question: ce sont les musulmans qui sont en première ligne de leurs théocrates; à force de faire buter parce qu’ils ne font pas le Ramadan, je ne doute pas que la guerre civile interne à l’islam n’accouche à terme sur un rejet du dogmatisme et de la théocratie. Nul besoin d’adhérer à notre abusive ritualisation de la laïcité pour rejeter la théocratie. Et notre extrême droite est bien la preuve qu’il est parfaitement possible de nourrir une nostalgie (si ce n’est plus) de la théocratie tout en faisant des pieds et des mains pour ritualiser notre laïcité. Et la vider de son sens.
P.P.S: Ce débat, moral, dépasse de loin les seuls arguties juridiques dans lesquelles certains voudraient l’enfermer.
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Je me permets un pas de côté à partir de votre texte : » qu’elles n’ont aucune conviction religieuse propre et aucun libre arbitre ».
Je suis toujours surpris de constater que la notion de libre arbitre (volonté libre), totalement incompatible avec un monde matérialiste / scientifique / déterministe et indéterministe soit encore d’actualité dans maints discours, dont ceux de certains scientifiques « éminents ». Pour ceux que cette question intéresse : voir « librearbitre.eu » et/ou « illusionlibrearbitre.blogspot.com« .
Donc, si l’existence d’un libre arbitre ontologique ne peut être prouvé et qu’il ne s’agit que d’une illusion comme je le pense, le sujet revient à modifier autant que possible les déterminations parentales / sociales amenant à questionner les croyances, différencier ce qu’on sait de ce que l’on ne sait pas… dans le cadre de l’éducation républicaine, avec des approches critiques philosophiques et scientifiques adaptées aux différents âges. Les signes religieux et autres vêtements suivront car ils ne sont que l’écume des convictions profondes.
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J’ai beau pencher comme vous vers le déterminisme causal, je me garderais bien d’affirmer comme vous que le débat est clos. Il ne l’est pas, il continue d’agiter les philosophes et les scientifiques les plus éminents du monde. La position compatibiliste a été défendue par Daniel Dennett (Freedom evolves, 2003) pour qui j’ai un immense respect. Et plus récemment par Kevin Mitchell (Free agents).
Je ne suis pas convaincu par les arguments de Kevin Mitchell, mais je pense qu’il faut faire preuve d’un minimum de modestie avant de décréter que ni lui, ni Dennett, ni tous les autres n’ont rien compris.
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Concernant l’usage que je fais ici du mot « libre-arbitre », le déterminisme causal n’y change rien. Tout ce que je dis, c’est que la détermination des choix vestimentaires par les femmes ne se réduit pas à obéir mécaniquement aux injonctions des proches ou des imams: il y a plein d’autres facteurs qui participent à déterminer leur choix, et qui font de leur choix un choix personnel.
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Oui pour les multiples déterminants (dont ceux que nous ne connaissons pas) qui amènent à un choix… plus ou moins provisoire ; mais non pour un choix « libre » façon libre arbitre ontologique. C’est tout ce que je voulais dire.
Concernant Dennet, naturaliste et évolutionniste, il théorise dans un ouvrage l’hypothèse d’une « néo-dualité moderne » qui ne serait toutefois pas celle de Descartes que tous ont abandonnée pour de bonnes raisons. Dennet écrit : « L’amour authentique n’implique aucun dieu volant (tel Cupidon). Le problème du libre arbitre est identique. Si vous êtes de ceux qui pensent que le libre arbitre n’est vraiment libre que s’il surgit d’une âme immatérielle qui se balade tranquillement dans le cerveau, envoie ses décisions (ses flèches) dans votre cortex moteur, alors, étant donné votre conception du libre arbitre, ma position est qu’il n’y a pas de libre arbitre du tout ». Le concept, l’essence d’un Libre Arbitre « réel » n’existe pas plus que le concept de cheval, de peur, d’immortalité, d’amour etc. Et si les circuits neuronaux de la sensation de volonté libre (cortex cingulaire antérieur et précunéus : cf. « Lesion network localization of free will » – 2018 –https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6196503/ ) sont différents des circuits de la sensation de peur (amygdales), ils ont finalement des fonctions différentes pour un but similaire : la survie, la préservation de l’individu et de l’espèce.
Ces circuits sous influence des expériences passées, du contexte, d’éventuelles anomalies génétiques peuvent ne pas être « adaptés » à la vie en société avec ses normes du moment. Un caractère très (trop) colérique peut être à l’origine de quelques déboires en société du fait d’un contrôle insuffisant du sujet. Mais ce dernier ne « contrôle » pas ce « contrôle déficient de la colère », car sinon il n’aurait pas d’accès de colère. Côté Libre Arbitre, on ne peut que vouloir, c’est-à-dire choisir une action permettant au mieux sa survie avec les moyens du bord (expériences passées, humeur du moment, capacités cognitives etc.). Mais si l’on peut « vouloir », on ne peut « ni vouloir vouloir, ni ne pas vouloir vouloir ». Ce serait vouloir avant de vouloir : une ineptie comme le remarquait déjà il y a quatre siècles le philosophe Thomas Hobbes. Dennet rejette bien un libre arbitre qui émanerait d’une puissance immatérielle (surnaturelle), et pense avec raison que notre sentiment de libre arbitre est réel. Ce sentiment pourrait être l’expression d’une faculté ayant évolué pour nous permettre de peser le pour et le contre des situations que nous rencontrons où les choix sont multiples. Je suis tout à fait en accord avec cette notion de sensation (sentiment) de Libre Arbitre mise en place par l’évolution, peut-être présente d’ailleurs chez l’animal (primate ?) même s’il ne fait pas des colonnes pour et contre sur un paper-board avant de prendre une décision. Mais nul besoin d’invoquer ici – comme le fait Dennet – une nouvelle dualité qui ne peut que brouiller encore un peu les cartes et mène à confondre sensation subjective et réalité. Dennet affirme qu’il ne s’agit pas de magie… Mais parler de responsabilité quand il s’agit en fait de culpabilité (l’individu serait-il censé pouvoir faire autrement ?), avancer l’hypothèse de « formes de libre-arbitre » ou encore affirmer que « les humains ont un nombre incalculable de degrés de liberté » comme il le dit dans une discussion avec Harris… Quelles sont donc ces « formes » et « degrés de liberté » du LA, supportés par quelle base théorique un tant soit peu scientifique, et avec quelle mesure ? Et puis l’assemblage des déterminants avec une sensation de LA elle-même déterminée dans le cadre de l’évolution, cela ressemble fort à une somme de déterminants qui n’autorise ni liberté de la volonté, ni culpabilité, ni punition.
La charge de la preuve dans un paradigme matérialiste revient aux croyants d’un libre arbitre métaphysique. Ou alors on en vient à remettre sur la table la pierre philosophale qui transmuterait de vils métaux (déterminants) en or pur (esprit / Libre Arbitre / conscience…). En revanche, la responsabilité sociale et morale (et non pas la culpabilité) qui semble être profondément la préoccupation de Dennet (en fait argument de la conséquence) reste pour moi évidemment entière dans un paradigme matérialiste sans LA ontologique.
Comme vous le savez, tout ceci nous vient peu ou prou de la Grèce antique – dont Epicure – en passant par Spinoza, Hobbes, La Mettrie, Locke, Schopenhauer, Nietzsche, Darwin, Laplace, Einstein, Freud, Monod, Laborit, Libet et Soon, Harris, Wegner, les Churchland, Haggard, Haynes, Sapolsky, Pereboom… Je ne suis pas certain que l’on puisse enjamber les idées et convictions argumentées de ces philosophes et scientifiques facilement, à moins de revenir sur des bases spiritualistes avec quelques gros morceaux de surnaturel.
Désolé d’avoir été si long mais le sujet est d’importance, tant les conséquences sociales, politiques et personnelles sont intenses…
J’aurais grand plaisir à en discuter de vive voix (« formulaire de contact » colonne de droite dans le blog : https://illusionlibrearbitre.blogspot.com/)
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Je crois que nous sommes d’accord.
Plutôt que d’asséner que le libre-arbitre est une illusion, il me semble plus constructif d’expliciter quelle notion de libre-arbitre est sans doute une illusion, et quel autre sens de libre-arbitre peut éventuellement être acceptable.
Comme le fait ici Steve Stewart-Williams: https://www.stevestewartwilliams.com/p/the-problem-of-free-will-solved
Etes-vous d’accord avec cette manière de présenter les choses?
Vous précisez bien « libre-arbitre ontologique », mais ce n’est pas un terme compris par la plupart des gens, et ce n’est pas forcément le sens de libre-arbitre utilisé par la plupart des gens (en tous cas pas moi dans l’article ci-dessus).
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Pas réellement d’accord, en fait :o)
La définition « profane » du libre arbitre est l’un des objets d’études en philosophie expérimentale (Florian Cova et bien d’autres) : il n’en sort rien d’autre que des contradictions internes (je peux vous en dire plus si le sujet vous intéressait).
Pour en venir aux propos du philosophe et biologiste évolutionniste Steve Stewart-Williams :
« Le braquage de la banque était un comportement volontaire et non contraint, et il serait donc approprié et utile de tenir le braqueur responsable de ses actes » : responsable oui ; devant rendre des comptes, oui ; coupable car il aurait pu faire autrement, non.
La volonté ne peut pas se tenir en surplomb des déterminants ancestraux et ne peut être une « émergence » libérée de toute détermination. Elle est un certain résultat – à un moment donné – de ces déterminants.
L’animal non humain a également des déterminants réglant sa survie, avec une forme de volonté bien souvent imprévisible, sans libre arbitre pour autant, même pour les zélotes du LA. Etre compatibiliste, c’est être spiritualiste (généralement sans le savoir). Mais ce n’est pas une injure… juste une erreur de jugement tout à fait surprenante lorsqu’on dispose (par chance) d’une bagage scientifique + philosophique.
L’intention, la volonté en termes de sensations existent bien, à moins d’être éliminativiste de ce point de vue (ce qui n’est pas exclu), mais ce qui ne change rien à la discussion de fond. Posséder une volonté « libre », ce serait de la magie, du surnaturel, du spiritualisme… à moins de remettre en cause les lois naturelles jouant, certes, avec un déterminisme / indéterminisme chaotique… Mais on n’a rien trouvé de mieux pour travailler sur la réalité théorique comme empirique. Je suis du côté de Sam Harris sur ces questions.
Sans compter que la vision de l’humain sans LA offre quelques antidotes contre les côtés obscurs du LA, ceci sans convoquer un quelconque argument de la conséquence (https://illusionlibrearbitre.blogspot.com/2024/05/le-cote-obscur-du-libre-arbitre.html). Mistral et le philosophe Greg Caruso semblent d’accord : une chance à nouveau :o)
Pour plus de détails, suite à notre début de discussion, j’ai rédigé une capsule sur Dennet et le compatibilisme : https://illusionlibrearbitre.blogspot.com/2024/09/dennet-et-le-compatibilisme.html
Suivant vos déterminants actuels, vous me direz… ou non !
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La charte de la laïcité dans les services publics est très claire :
« La liberté de religion ou de conviction ne rencontre que des limites nécessaires au respect du pluralisme religieux, à la protection des droits et libertés d’autrui, aux impératifs de l’ordre public et au maintien de la paix civile. »
J’ajouterais en ce qui concerne l’enseignement public : la protection des mineurs.
On l’aura compris la laïcité ne se confond pas avec la neutralité. Elle découle de deux impératifs plus larges auxquels elle est tenue de se conformer : l’ordre public et la paix civile, fondements de toute société démocratique.
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